À sa mort, le 1er septembre 1715, le roi Louis XIV laisse la couronne à son arrière-petit-fils, Louis XV (5 ans). Dès le lendemain, son neveu le duc Philippe d’Orléans obtient la régence.
Les mœurs se dérident et la haute noblesse prend sa revanche. Elle remplace les bourgeois au gouvernement et impose que lui soient réservées les hautes charges de l’armée et de l’Église.
Après la mort du Régent, en 1723, Louis XV (15 ans) épouse Marie Leszczynska (22 ans), fille d’un roi détrôné de Pologne. L’union sera heureuse, au moins pendant une dizaine d’années, et surtout féconde (dix enfants).
En 1726, le sage cardinal de Fleury, précepteur du roi, devient à 73 ans le plus vieux Premier ministre qu’ait eu la France. Il restera à son poste jusqu’à sa mort, en 1743, à 90 ans !
Pacifique, il se contente en 1733 d’une modeste intervention dans la guerre de la Succession de Pologne en faveur du père de la reine. Mais il ne peut éviter la désastreuse guerre de la Succession d’Autriche, consécutive à la mort de Charles IV de Habsbourg et à l’accession au trône de sa fille Marie-Thérèse.
La France noue une coalition contre l’Autriche le 28 mai 1741. La Prusse de Frédéric II s’y associe le temps d’annexer la Silésie.
Louis XV se rend en personne à la guerre comme autrefois Louis XIV mais il tombe malade à Metz en 1744. Le peuple prie pour son rétablissement et lui donne le surnom de «Bien-Aimé». Mais sa popularité ne résistera pas à la fin de la guerre…
La victoire française est gâchée par le traité de paix d’Aix-la-Chapelle à l’occasion duquel Louis XV renonce à toute annexion. Le seul vainqueur est Frédéric II qui se voit confirmer l’annexion de la Silésie. D’où l’expression populaire : «travailler pour le roi de Prusse» !
L’autorité monarchique n’est plus ce qu’elle était !... Louis XV qui, depuis la mort du cardinal de Fleury, dirige en personne son Conseil, tombe sous l’emprise de ses maîtresses dont la plus notable est la marquise de Pompadour. Les privilégiés, soutenus par les parlementaires, font échouer en 1749 la courageuse réforme fiscale du «vingtième» qui prévoyait d’imposer tous les revenus.
Sous le règne de Louis XV, la France jouit d'une situation de premier plan. Elle est le pays le plus peuplé d'Europe avec 26 millions d'âmes. Elle en est aussi le plus prestigieux et le plus puissant, malgré quelques déconvenues dans sa rivalité avec l'Angleterre. Elle possède une flotte remarquable, la Royale, et ses colonies sucrières comme Saint-Domingue rendent jaloux les Anglais.
La langue et la culture de la Cour de Versailles rayonnent de Berlin, en Prusse, à Saint-Pétersbourg, en Russie. C'est le «Siècle des Lumières». Mais dans les salons parisiens où l’on cultive l’art de la conversation, on murmure contre le pouvoir.
Un auteur à succès, Voltaire, qui a vécu en Angleterre, exalte les vertus de la jeune démocratie anglaise dans ses Lettres anglaises (1734). De grands esprits remettent en cause l’absolutisme au nom de la raison. Le plus célèbre est Montesquieu, auteur de L'Esprit des Lois (1748). Le 1er juillet 1751, Diderot et d’Alembert publient le premier tome de L’Encyclopédie avec la collaboration de tous les savants de leur temps et sous la protection de la marquise de Pompadour.
Le 1er mai 1756, coup de tonnerre à Versailles. L'Autriche et la France enterrent une rivalité qui remontait à Charles-Quint et François 1er. Les deux États signent un traité pour contrecarrer la montée en puissance de la Prusse et les visées de l'Angleterre.
Ce «renversement des alliances» va déboucher sur une nouvelle guerre, dite guerre de Sept Ans (1756-1763). Se déroulant en Europe mais aussi en Amérique, aux Indes et sur les mers, en impliquant toutes les grandes puissances européennes, elle sera a posteriori considérée par les historiens comme la première guerre mondiale !
La guerre commence très mal pour les Français. Soubise est défait par Frédéric II à Rossbach malgré l’écrasante supériorité numérique de son armée. Le marquis de Montcalm meurt en tentant d’empêcher les Anglais de prendre Québec. Lally-Tollendal capitule à Pondichéry, aux Indes…
Par le traité de Paris du 10 février 1763, la France cède à l’Angleterre la plus grande partie de son empire colonial, en particulier la Nouvelle-France (le Québec) et les Indes. Mais elle conserve Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti). C'est la seule colonie à laquelle tiennent les bourgeois de l'époque, y compris les «philosophes», en raison des riches plantations de sucre où travaillent les esclaves, le sucre jouant alors le rôle du pétrole dans nos économies.
En décembre 1770, Choiseul est renvoyé à l'instigation de la nouvelle favorite royale, la comtesse du Barry, et remplacé par le duc d'Aiguillon qui, avec le chancelier Maupeou, va tenter des réformes audacieuses. L'année suivante, dans un ultime sursaut d’autorité, Louis XV fait arrêter et exiler les magistrats du Parlement de Paris. Quelques semaines après, le roi réforme le système judiciaire en abolissant la vénalité des charges. Ces réformes n'auront hélas pas de suite.
Lorsque meurt le vieux roi, dans l’opprobre générale, le 10 mai 1774, son successeur Louis XVI n'aura d'autre hâte que de rappeler les parlementaires. C'est la première d'une longue série d'erreurs qui mèneront Louis XVI à la guillotine et feront perdre à la France son premier rang parmi les grandes puissances du monde. «On peut sans exagération dire que la Révolution date de 1774», écrit l'historien Jean Tulard.