Le Blog de Lazare

Formellement, la France manifeste son soutien à l’Arménie dans le conflit qui l’oppose à l’Azerbaïdjan à propos du Haut-Karabakh, une république indépendante peuplée majoritairement d’Arméniens, sur laquelle, après un blocus de plusieurs mois, l’Azerbaïdjan a fait main-basse le 19 septembre 2023, causant la fuite de plus de la moitié de la population.

https://ripostelaique.com/haut-karabakh-vers-un-nouveau-genocide-armenien.html

La ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna était en visite en Arménie ce mardi 3 octobre pour exprimer toute la sympathie de la France envers les Arméniens. Oui mais notre pays, comme le reste de l’Union européenne importe du gaz azéri. Ce gaz provient du site de Shah Deniz, au sud-est de Bakou, la capitale de l’Azerbaïdjan. Ce gisement, évalué à quelque 100 milliards de m3, est entre autres géré par le britannique BP, par la compagnie nationale azerbaïdjanaise Socar, et par Lukoil, la deuxième compagnie pétrolière russe après Gazprom. Long de 3 500 km, le TAP (Trans Adriatic Pipeline) relie Shah Deniz au sud de l’Italie, via l’Arménie, la Turquie, la Grèce et l’Albanie.

En 2021, le TAP n’a acheminé que 2% de la consommation de gaz du continent européen. Socar était donc considérée comme un fournisseur de seconde importance en regard du gaz russe. La situation a changé avec la guerre en Ukraine et l’arrêt (partiel…) d’importation de gaz russe par les pays européens. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’est rendue à Bakou l’année dernière pour signer un accord pour doubler les livraisons de gaz azerbaïdjanaises d’ici 2027.

Rompre les relations commerciales avec l’Azerbaïdjan ne peut résulter que d’une décision à l’unanimité des Etats européens. Une décision qui aurait pour conséquence de rendre le vieux continent encore plus dépendant du gaz de schiste américain, quatre fois plus onéreux. L’Allemagne, dont la puissante industrie était fondée sur un gaz russe bon marché, est aux abois depuis les mesures anti-russes prises par la Commission européenne. Pas sûr que nos voisins d’Outre-Rhin soient disposés à se priver du gaz azéri. Un nouveau génocide arménien se profile dans l’indifférence générale de la communauté internationale.

Henri Dubost