Je vais vous parler des éleveurs. Vous savez, ceux qui sont à la fois méprisés par le pouvoir – qui leur avait pourtant promis monts et merveilles sans, bien entendu, tenir parole – et harcelés par des dégénérés gauchistes antispécistes et écologistes.
Comme je ne peux me permettre d’avoir les prétentions omniscientes de la jeunesse progressiste – laquelle sait tout sur tout sans avoir besoin d’apprendre quoi que ce soit ! –, je me suis dit comme ça que j’allais partager la journée d’un éleveur de vaches limousines. Il a mon âge, une grande l’expérience du métier et, pour l’occasion, il était accompagné de ses deux enfants. C’était d’autant plus instructif que, ce jour-là, il conduisait ses bêtes au pâturage, après plusieurs semaines en stabulation, c’est-à-dire à l’étable.
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D’emblée, et je devine qu’en écrivant cela je vais décevoir les écolo-fanatiques qui pensent que les éleveurs sont des sadiques maltraitant leurs bêtes, j’ai vu un homme qui avait un respect infini pour ses animaux. J’ai aussi vu l’authentique pénibilité au travail, même si notre ami éleveur, de son propre aveu, ne pourrait pas travailler ailleurs que sur son exploitation. Il suffisait de voir son regard embrasser ses prairies où broutaient alors ses bêtes pour comprendre qu’il était enraciné dans sa terre comme les arbres autour de lui. Jules Renard disait : « Un paysan, c’est un tronc d’arbre qui se déplace. »
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J’ai ainsi vu un homme œuvrer sans relâche pendant plusieurs heures, devant à la fois user de ses muscles et de sa tête. Car il faut penser à tout, les bêtes pouvant par exemple à tout instant créer un mouvement de panique au moment d’entrer dans la bétaillère qui doit les emporter dans les prairies. Cela peut aussi s’avérer dangereux et mon éleveur – dont je tairai le nom afin qu’il ne soit pas ennuyé à cause de mes « mauvaises » fréquentations identitaires ! – m’a confié avoir déjà été blessé par des coups de sabot, voire été attaqué par une vache qui venait d’avoir son veau. D’où les précautions qu’ils prenaient lui et ses enfants.
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À propos de ses enfants, on peut parler d’anomalie, moi qui étais habitué à croiser la route de gamins mal élevés pourris gâtés et égocentriques qui n’auraient certainement pas passé une journée à aider leur père comme les deux fils de cet éleveur, qui n’envisagent quant à eux rien d’autre pour leur avenir que de marcher dans les pas de leur père. Et ils s’y connaissaient ces deux-là, qui me décrivaient le travail, auquel je participai timidement quelquefois sous leur contrôle. Des gamins qui, le soir venu, rangeaient et nettoyaient le matériel quand des fils de bobos ont déjà du mal à mettre la table ! N’oublions pas l’épouse de l’éleveur qui, avec sa délicatesse toute féminine, soutient son mari, elle qui a compris cette phrase qui soudait jadis les familles : « Pour le meilleur et pour le pire »…
Lorsqu’ j’évoquais les difficultés du métier, l’éleveur me souriait d’un sourire à la fois résigné et fatigué, me montrant comment l’administration pouvait être implacable lorsque, dans le même temps, elle aide avec entrain des migrants entrés illégalement en France et entièrement pris en charge ! C’est ainsi que le soir, autour d’un apéritif, j’ai pu constater la masse de paperasserie que l’éleveur avait à remplir. « Sans ça, me dit-il, je ne pourrais pas vendre mes bêtes. » Paraît que les procédures administratives devaient être allégées, monsieur le Premier ministre ?!
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Voir cet homme travailler sans relâche, été comme hiver, jour comme nuit, particulièrement au moment du vêlage, avec humilité et ne prétendant pas exercer un métier plus dur qu’un autre, c’est une leçon de vie. Et il faut en savoir des choses pour tenir son exploitation, bien loin de cette image de brutes incultes véhiculée par des gauchistes qui, lorsqu’ils sévissent à la campagne, entendent tout interdire, depuis la coupe des arbres – comme ça, c’est mieux, le feu prend plus vite lors des incendies ! – jusqu’au curage des fossés et canaux, histoire de faciliter les inondations ! Les mêmes qui prennent de l’essence pour tout brûler sur leur passage au nom de l’écologie !
Ces mêmes détraqués refusent qu’on mange de la viande, donc qu’on tue des animaux. Savent-ils, ces crétins finis au jus de pomme fermenté, qu’ils tuent des centaines, voire des milliers d’insectes par an sans s’en rendre compte ?! Ces nuisibles sont une épine de plus aux pieds des éleveurs, sans cesse vilipendés par une horde d’extrémistes dangereux et jouissant d’une totale impunité. Des extrémistes tout-puissants qui entendent changer le réel : comme on naît homme ou femme et qu’on le demeure, on naît omnivore !
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Les éleveurs, ces mal-aimés qui subissent une concurrence aussi déloyale qu’infâme, sont pourtant une partie non-négligeable de notre patrimoine et, comme je l’ai constaté de mes propres yeux, même si tous ne sont pas exemplaires, ils sont très éloignés de cette caricature cruelle qu’on propose d’eux. Caricature qui les rend méfiants à l’égard des nouveaux-venus. Mais cela se dissipe assez vite, pour peu qu’on se donne la peine de les écouter raconter qui ils sont vraiment, car personne ne les écoute plus…
(Je dédie cet article aux vrais gens de la terre)
Charles Demassieux
(Photos : Charles Demassieux)