La France est en guerre contre la Russie. Pas de déclaration en bonne et due forme, mais une série de faits qui confirment la volonté de chacun des deux camps d’en découdre. Compte tenu de la disproportion des forces nucléaires en présence, il s’agit pour la France, au mieux d’un bluff absurde, au pire d’une folie suicidaire.
L’accord signé le 16 février dernier entre les présidents Macron et Zelensky coûtera aux contribuables français la bagatelle de 3 milliards d’euros (Md€) d’aides militaires à l’Ukraine pour l’année 2024.
La France a déjà craché au bassinet pour 1,7 Md€ en 2022 et 2,1 Md€ en 2023.
Macron se passe de toute discussion devant la représentation nationale, un fait du prince qui constitue clairement une violation de l’article 53 de la Constitution.
Par ailleurs, sur les 50 Md€ d’aides que la Commission européenne a décidé de verser à l’Ukraine, plus de 8 Md€ seront à la charge de la France.
Dans une déclaration commune publiée ce mardi sur leur blog respectif, Hubert Védrine et Jean-Pierre Chevènement mettent en garde les Français contre les conséquences cataclysmiques que pourraient avoir l’accord du 16 février et l’éventualité d’une « européisation » de la dissuasion française :
« Déclaration conjointe de Hubert Védrine et de Jean-Pierre Chevènement
Face au développement de la crise due à l’invasion de l’Ukraine et à des menaces récentes, des décisions aussi importantes que celles qu’entrainent l’Accord de sécurité conclu ce vendredi à Paris, ou les déclarations préalables à la Conférence de sécurité de Munich, notamment celles qui concernent une européisation de la dissuasion, méritent un débat public. Les récentes déclarations de Donald Trump remettant en cause le traité de l’Atlantique Nord et l’hypothèse de sa victoire à l’automne ne peuvent être ignorées. Elles impliquent que les Etats européens ne soient pas surpris par leurs conséquences. Ils doivent mesurer la portée de telles décisions.
C’est pourquoi, aussi, il serait raisonnable d‘engager dès aujourd’hui le débat politique sur le fond, et d’en saisir le Parlement. C’est affaire de démocratie, mais c’est également une question de responsabilité pour que l’Europe puisse affronter en bon ordre des échéances qui seront difficiles. De tout cela, chacun doit prendre conscience faute de risquer d’être entraînés dans un avenir proche dans un engrenage que nous ne maîtriserons pas. »
Les Russes ont reçu le message cinq sur cinq : Macron a clairement l’intention de mettre la totalité de l’arsenal militaire de la France au service des Ukrainiens.
Le fait que la France soit une puissance nucléaire change singulièrement la donne : la Russie s’autorisera à utiliser son armement nucléaire tactique, voire stratégique, contre notre pays, ce qu’elle s’est jusqu’à présent refusé à faire contre l’Ukraine.
Annonçant lors de la conférence de la sécurité qui s’est tenue il y a une semaine à Munich son intention d’élargir la dissuasion nucléaire à l’ensemble de l’Union européenne, Macron place une cible sur la France : notre pays devient pour Moscou un objectif nucléaire de choix. Inutile de préciser que la France n’a évidemment pas les moyens d’assurer une protection de son territoire contre un tir groupé de Sarmat ou de Zircon hypersoniques, et pas davantage les moyens de riposter. Seuls les grands naïfs peuvent s’imaginer que les États-Unis mettront un point d’honneur à venger le vieil « allié » français réduit à l’état de chaleur et lumière…
Les Russes commenceraient évidemment par détruire l’ensemble de notre force de dissuasion. Rappelons que cette force se compose très modestement de quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins armés de missiles mer-sol balistiques stratégiques de type M51, ainsi que des forces aériennes stratégiques, qui disposent de missiles air-sol moyenne portée « améliorés » (sic) emportés par des Dassault Rafale de l’Armée de l’air et de l’Aéronautique navale. Nos sous-marins ont été depuis longtemps repérés par les satellites russes. Quant aux Rafales, on leur souhaite bonne chance pour arriver à décoller avant l’arrivée des missiles hypersoniques russes… Bref, pas de quoi affoler l’état-major russe qui peut compter sur une force de frappe largement supérieure en nombre d’ogives, ainsi qu’en capacité de feu et de rapidité.
Sur RTL ce 22 février, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a paru s’étonner du « comportement de plus en plus agressif de la Russie à l’égard de le France », évoquant une centaine d’incidents « allant de simples communications menaçantes à des tentatives de contrôle sur des patrouilles françaises dans des espaces aériens et maritimes internationaux libres d’accès ».
Si, par le passé, il avait été fait état de quelques interactions tendues entre les forces françaises et russes [survol de frégates de la Marine nationale par des chasseurs-bombardiers ou approche d’un satellite de communication par un engin « butineur », par exemple], le ministre a souligné qu’un « tel niveau d’agressivité n’existait pas auparavant ».
Selon le ministre : « Le comportement de la Russie en 2024 n’est plus du tout celui que l’on avait pu connaître en 2022 et évidemment avant l’agression de l’Ukraine », et cette attitude s’est durcie « singulièrement » à l’égard des Européens.
« Vous avez désormais des interactions autrement plus agressives », notamment « avec nos forces armées », a-t-il poursuivi. « Vous avez, au moment où l’on se parle, des patrouilles en mer et des patrouilles aériennes qui permettent de garantir des libertés d’action en Méditerranée, en mer Baltique, en mer du Nord, plus rarement en mer Noire. Vous avez des interactions, c’est à dire des tentatives de prise de contrôle de la part des Russes d’un certain nombre de nos patrouilles », a-t-il continué.
« Il y a un mois, […] un système de contrôle aérien russe a menacé d’abattre des avions français en mer Noire alors qu’ils étaient dans une zone internationalement libre », a révélé le ministre.
« Clairement, vous avez des opérateurs russes qui menacent des pilotes français d’abattre leurs aéronefs », a-t-il insisté. Il est possible qu’une patrouille de Mirage 2000D mettant en œuvre une nacelle de guerre électronique ASTAC ait été visée par ces menaces russes.
« Il faut bien comprendre que c’est vieux comme la guerre froide » a souligné M. Lecornu, et « que, de nouveau, nous avons le retour d’un positionnement russe particulièrement agressif », auquel s’ajoutent « le cyber, l’informationnel, le chantage énergétique ».
On s’étonnera qu’un Lecornu puisse s’étonner de la réaction « particulièrement agressive » du Kremlin face aux menaces françaises…
Henri Dubost