Le Blog de Lazare

Les agriculteurs ont sans surprise repris le chemin de la contestation. Nous l’avions entrevu au lendemain de l’abdication de la FNSEA, considérant que les solutions apportées par le gouvernement Attal ne régleraient rien. Pourtant les journalistes et ses amis n’avaient pas de mots assez forts pour vanter les mérites de ce jeune premier ministre, érigé en négociateur hors pair, à la carrure d’homme d’État. Attal devenait celui qui avait mis fin au conflit des agriculteurs, sans effusion de sang, un vrai tremplin pour un destin prometteur et grandiose. Soit ceux qui l’encensaient ne parvenaient pas à cerner le fond du problème et se laissaient abuser par cette victoire en trompe l’œil, soit ils étaient intimement convaincus que la méthode Attal était la bonne. Dans les deux cas, le constat est dramatique puisqu’il démontre le déphasage monstrueux qui existe entre ces « intellectuels dirigeants » et la compréhension des difficultés du peuple. Peu diplômés, peu compétents et peu expérimentés, ils ne sont justement pas des « intellectuels ».

Sont-ils vraiment aussi déconnectés ou, conscients de leur impuissance, contraints de mentir et d’utiliser les recettes qui ne marchent plus faute d’être autorisés à mettre les pieds dans le plat ? Attal a bel et bien échoué, voilà le patron qui dans une lueur de génie comme il nous en gratifie depuis sept ans, lance l’idée d’un grand débat en plein salon de l’agriculture. Les affidés crient au visionnaire, régler le problème au cœur même des intéressés pendant leur principale manifestation, est médiatiquement un coup d’éclat, un moyen de faire taire la contestation. L’humble chef d’État qui se propose de rencontrer tout ce beau monde dans un environnement hostile, si ce n’est pas du culot et du courage ça y ressemble non ? Mais les conseillers de Macron ne se sont pas contenté de nous préparer un show dont ils ont le secret, ils ont voulu opposer deux monde et montrer comment Macron était au-dessus de tout cela… Cette provocation se serait donc déroulée en marge de l’Elysée et de Matignon. Quoi qu’il en soit l’invitation de l’association écolo « Les soulèvements de la Terre », qui aurait dû être dissoute par Darmanin pour ses actes de vandalisme et appels à l’insurrection, n’a pas été du goût des agriculteurs, qui ont refusé de participer à cette causerie, et le patron de la FNSEA lui-même, pourtant grand ami de Macron, s’est senti obligé de claquer la porte.

Devant ce nouvel échec et pour tenter de rattraper la bévue, l’Élysée dans un tweet officiel, a démenti, en invoquant une « erreur de communication ». Dame, on se pince en espérant que de telles confusions ne se produisent pas dans d’autres domaines, notamment militaire.La bourde pourrait nous coûter cher, et un simple « oups » ne suffirait pas à nous rassurer, ou nous éviter le pire. Ce n’est pas une erreur, ce serait, selon les révélations du point, une initiative de deux conseillers, Matthias Ginet, et Benoit Fargo et Macron n’aurait pas été mis au courant. On reste circonspect quant à cette nouvelle explication. Cela sous-entendrait que tout le monde est en roue libre dans ce gouvernement. Une chose est certaine, la vision du monde agricole par le prisme citadin est la confirmation que ces gens là ne savent pas de quoi ils parlent et vivent en marge de la réalité.

L’initiative ressemble cependant bien à la méthode macroniste, se servir de cet événement pour mettre en porte à faux le monde paysan. On connaît l’homme et c’est bien le genre de coup tordu dont il est capable. Et si l’entreprise échoue, il fait porter le chapeau à d’autres. Cette petite comédie n’aura finalement pas lieu, c’est un échec de plus. Habituellement c’est à l’international qu’il subit de tels revers. Au dernier sommet de la COP 28 il avait voulu rencontrer ses homologues, il a été ignoré de tous. À présent, ses mises en scène n’intéressent plus les nationaux eux-mêmes et les participants se récusent le laissant seul avec son théâtre improvisé.

Il faut rappeler que l’homme a usé de ce stratagème pour enfumer les Français, en leur faisant croire qu’ils les écoutaient et qu’ils leur donnaient la parole. On se souvient des cahiers de doléance, puis se fut avec les chefs de parti, les fameuses rencontres de St Denis, nouveau pschitt. Macron s’inquiète de la forme, mais pas du fond, il veut que les caméras soient braquées sur lui, être au centre du spectacle. Il n’a rien à dire, n’a aucune marge de manœuvre puisque tout se décide à Bruxelles, mais l’important est ailleurs, il doit être dans la lumière, au cœur de l’événement. Plus personne n’est dupe, et penser qu’une réunion en plein salon ferait l’affaire pour trouver les réponses aux questions qu’il refuse de se poser au sujet de l’Europe, est une énième insulte.

S’il suffisait d’une discussion a bâton-rompu pendant quelques heures pour tout régler… La réalité est bien moins croustillante. Il veut apaiser la colère parce qu’il sent qu’entre les élections européennes qui s’annoncent catastrophiques, et les JO qui pourraient bien être compromis si l’agitation se prolonge, c’est son image qui sera définitivement écornée. Pour un narcissique rien de pire. Imaginez un seul instant que la grogne continue jusqu’à l’ouverture des JO et que ces derniers soient si ce n’est annulés du moins suffisamment perturbés pour donner de la France le reflet d’un pays qui ne correspond pas du tout à ce que la macronie s’échine à décrire partout dans le monde.

C’est bien beau la propagande mais ça finit par se voir. De plus vient se greffer cette fâcheuse fronde sur l’article 53, décidément plus rien ne semble aller… Macron fait avec les agriculteurs ce qu’il fait avec le reste du peuple, il ment, tente d’amadouer mais poursuit son plan de destruction en faisant importer massivement des produits ukrainiens. Comme nous l’écrivions, il pense résoudre les conflits avec un carnet de chèques et de l’argent qu’il n’a plus depuis bien longtemps, quand la réponse ne peut qu’être politique. Les agriculteurs ne veulent pas d’aides, ni de réglementations sur ce qu’ils doivent planter ou élever, ni comment ils doivent le faire. Ce sont des professionnels et leur métier ils le connaissent mieux que les technocrates. Conscients des enjeux environnementaux laissons leur la liberté d’organiser leur travail et d’aménager la campagne comme ils le souhaitent en étant rémunérés de façon juste et équitable.

La tutelle de l’Europe est devenue insupportable mais elle l’est pour tout, notamment avec l’énergie, contraignant la France à des augmentations tarifaires injustifiées. C’est donc une réponse non pas financière directe qui pourra mettre un terme à cette crise mais bien politique, à savoir un grand débat sur l’avenir de notre nation au sein d’une organisation tentaculaire, technocratique et inhumaine. Doit-on se sacrifier au nom d’un fédéralisme qui ne tient pas compte des intérêts de nos paysans, pas plus qu’il ne se soucie de ceux de notre autonomie énergétique, sanitaire, militaire… La question de notre maintien dans cette UE doit être débattue et posée clairement. Reculer sous le prétexte qu’une indépendance souveraine n’est plus viable est un non-argument au regard de l’histoire et des capacités de notre pays. D’autres y parviennent qui ne sont pas mieux lotis que nous, serions-nous voués à n’être que des alliés obligés, vassalisés, au prétexte que nous sommes en Europe et français de surcroît ? Le bilan est sans appel, cette généreuse Europe qui devait nous apporter la paix et la prospérité, nous a conduits à la ruine et à la dépendance. Il est temps d’ouvrir les yeux et d’oser poser les vraies questions directement aux Français.

Pierre Duriot