Le 16 janvier dernier, le président Macron tenait une conférence de presse à l’Élysée. En réponse à la question d’une journaliste de The Economist au sujet de l’aide militaire qu’il entend apporter à l’Ukraine – une question aux allures de diktat de l’État profond US… -, Macron précise que la France est entrée en économie de guerre :
“Nous avons aussi développé des productions dans le cadre de l’économie de guerre qui vont nous permettre de fournir beaucoup plus de matériel à nos partenaires ukrainiens, en particulier des CAESAr qui sont attendus et nécessaires.”
Et que notre industrie d’armement s’apprête à livrer à l’Ukraine “une quarantaine de missiles SCALP et plusieurs centaines de bombes”.
L’entrée de notre pays en économie de guerre n’a fait l’objet d’aucune discussion de la représentation nationale. Simple fait du prince, annoncé en quelques mots, au détour d’une conférence de presse. Quel est alors le sérieux du catalogue d’intentions énoncées par le Président de la République en matière d’école, de justice, de Santé publique, etc. ? Sauf à accroître encore et toujours la dette publique, on ne voit pas comment l’État pourrait abonder à tout. Rappelons que cette dette s’élève au chiffre astronomique de 3000 M€ :
Un missile SCALP, fabriqué par Matra, peut être tiré d’un avion de chasse ou d’un navire. Il transporte une charge explosive de 450 kg et peut atteindre des cibles situées entre 250 et 500 km. « L’avantage du Scalp, c’est sa longue portée et sa relative vitesse qui peut lui permettre d’éviter les bulles de défense antiaérienne », selon un chercheur à l’Ifri (Institut français des relations internationales). Il permet donc une frappe en profondeur à l’intérieur du territoire russe.
Par ailleurs, ce type de missiles « permet l’attaque de précision d’objectifs fixes, fortement défendus et de grande valeur, jour et nuit et par tout temps », résumait en 2018 la Fondation pour la recherche stratégique, dans une note dédiée à ce type de missiles.
Entre 20 et 50 de missiles SCALP (la France est assez discrète sur le sujet) ont déjà été livrés à l’Ukraine (en complément des Storm Shadow, missiles similaires fabriqués par British Aerospace en coopération avec Matra). D’autres sources évoquent le chiffre de 80.
La France avait annoncé la livraison à l’Ukraine de premiers missiles SCALP en juillet 2023, lors du sommet de l’Otan organisé à Vilnius (Lituanie). Selon l’agence Reuters, ces livraisons ont été effectuées avec la garantie donnée par les Ukrainiens qu’ils n’utiliseraient ces missiles qu’à l’intérieur de leurs frontières et ne chercheraient pas à utiliser des armes françaises pour frapper le territoire russe. L’armée de Zelensky étant actuellement aux abois, cette garantie d’utilisation ne sera évidemment pas respectée par les Ukrainiens. Un détail qui place la France en situation de cobelligérance.
Notre pays est donc, par décision solitaire du monarque républicain, en première ligne de front dans une guerre qui est celle de son suzerain états-unien et non la sienne.
Quarante missiles SCALP représentent une ponction énorme pour nos forces armées qui ne disposent que de 100 à 200 SCALP. Après ponction, notre stock de SCALP devrait donc être nettement inférieur à 200 unités, qui est le stock de l’Arabie saoudite… Nos forces armées devront donc rapidement renforcer leur stock. Rappelons que le coût unitaire d’un SCALP avoisine le million d’euros. Qu’importe, puisque la France est passée en économie de guerre, soit dans le “quoi qu’il en coûte” en matière de dépenses militaires.
Dans la situation actuelle du front en Ukraine, où l’armée russe gagne chaque jour du terrain, le seul moyen d’obtenir un avantage est de frapper en profondeur. Et pour cela, le SCALP est très utile. D’où l’insistance de Zelensky…
Quant aux canons CAESAr, ils constituent l’un des fleurons de notre industrie d’armement. Leur maniement exige une formation pointue. La France en a déjà livré une cinquantaine à l’Ukraine, là aussi prélevée sur le stock de nos armées. Le chef de l’État n’a pas précisé le nombre de CAESAr qui vont être livrés à l’Ukraine.
Aucune précision sur la nature des “centaines de bombes” qui font partie du nouveau paquet-cadeau pour les beaux yeux de Zelensky. Une dépense sans doute rondelette pour notre budget. Mais qu’importe, puisque la France est passée en économie de guerre…
Henri Dubost