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16 décembre 2023 6 16 /12 /décembre /2023 00:49
Scandale d’État : ce que cache le recours à McKinsey et Cie…

Nous apprenons avec la plus grande stupéfaction que plus de 6 % du budget de l’État, soit 43 milliards d’euros (plus que le budget de la Défense), ont été consacrés à ce que l’on nomme « externalisation intellectuelle » ces 3 dernières années.

Sous ce terme alambiqué se cachent les milliers de missions confiées à des consultants extérieurs, comme Mc Kinsey ou KPMG, que notre gouvernement et nos collectivités locales payent à prix d’or afin qu’ils délivrent des rapports que presque personne ne lit, sur à peu près tous les sujets possibles et imaginables.

Malgré les montants faramineux dépensés pour ces consultants, le service public français ne cesse de se dégrader, comme chacun d’entre nous est en mesure de le constater au quotidien. De plus, il apparaît que ce recours à des consultants extérieurs ne s’est nullement accompagné de la moindre réduction du nombre de fonctionnaires ni d’agents de la fonction territoriale, dont l’augmentation  défie l’imagination.

La question que chaque citoyen est en droit de se poser est la suivante : si vraiment ces consultants extérieurs sont nécessaires à la bonne gestion des affaires de l’État, qu’on nous le prouve, et surtout que l’on réduise d’urgence le nombre de fonctionnaires qui, vraisemblablement, ne sont pas capables de faire leur travail correctement. Si ce n’est pas le cas, il conviendrait de punir sévèrement tous ceux qui ont fait appel aux services de ces consultants inutiles aux frais des contribuables.

Tous ceux qui ont travaillé dans une grande société ont forcément vu débarquer un jour ce genre de consultants ; la majorité du temps, quelques gamins de 25 ans fraîchement diplômés, accompagnés d’un consultant confirmé d’une quarantaine d’années, débarquent un beau jour dans vos locaux, arborant fièrement un costume plus ou moins bien taillé, selon le niveau du cabinet, et un ordinateur portable. On vous aura prévenu au dernier moment de leur venue. Ils vous dérangeront pendant des semaines, organisant des réunions afin que vous leur expliquiez la nature de votre activité. De par leur âge, ils ne connaissent rien et n’ont aucune expérience, mais on les paye pour vous conseiller.

Après quelques mois, ils partiront et un rapport sera remis à votre hiérarchie. Vous n’aurez bien entendu jamais accès aux conclusions de ce rapport. La majorité du temps, c’est un salmigondis de tableaux, de graphiques, encapsulés dans un verbiage indigeste caractéristique des consultants. La conclusion sera toujours la même : votre entreprise fait face à des challenges dus à un environnement économique en rapide mutation. Il faut donc se focuser sur les projets profitables et améliorer la productivité, par un développement de la transition numérique de votre société. Transition, que bien entendu, le cabinet se propose de mettre en œuvre lors d’une prochaine mission.

Ce tissu de conneries aura coûté des centaines, voire des millions d’euros. Tout cela bien souvent pour vous informer de l’existence de dysfonctionnements que n’importe quel employé a bien analysé depuis longtemps, et qui, dans la majorité des cas, auraient pu être résolus par un informaticien un peu dégourdi, pour une somme dérisoire. Si par malheur votre hiérarchie mord à l’hameçon, le cabinet de conseil vous incrustera des consultants à vie au sein de l’entreprise, qui finiront par développer une base de données gigantesque, complexe, inutilisable par le commun des mortels, et parfaitement inadaptée aux besoins. Cette dernière sera abandonnée après quelques mois, et vous retournerez à vos anciennes méthodes de travail.

Pourquoi cette folie ? Pourquoi les entreprises et nos dirigeants font-ils appel à ces parasites du système économique que sont les grands cabinets de conseil, dont il est de notoriété publique que les rapports et les recommandations ne servent généralement à rien, quand ils ne sont pas même nuisibles ?

La réponse est à chercher dans le rapport qu’ont un certain nombre de dirigeants, dans le domaine politique ou privé, avec la notion de responsabilité. Théoriquement, lorsqu’on accepte des responsabilités, on bénéficie certes d’avantages matériels (haut niveau de revenu) par rapport à ceux qui n’en assument pas, mais on doit également accepter de payer les conséquences résultant de mauvaises décisions que nous aurions prises.

Pour un petit patron, tout ceci est une évidence ; le concept fabiusien de « responsable mais pas coupable » ne leur est pas applicable, et ils payeront le prix fort à tous les coups. Par contre, au sein des grandes sociétés, est apparue une nouvelle race de parasite : le décideur qui ne veut pas être tenu pour responsable de ses décisions. Ces derniers ont donc trouvé dans les cabinets de conseil un bouclier, une sorte de tampon entre eux et la réalité. J’ai échoué dans ma stratégie, mais ce n’est pas de ma faute, car je me suis fait conseiller par les meilleurs cabinets de conseil américains, reconnus dans le monde entier. J’ai donc rempli mon contrat en termes d’obligation de moyens, je ne peux donc pas être tenu pour responsable des échecs.

À l’échelle de l’État, le problème est le même. Nos gouvernements ne rêvent que de se dessaisir de toute forme de pouvoir. C’est la raison pour laquelle Macron ne peut plus faire une phrase sans mentionner ses « partenaires européens », et qu’il ne prend aucune décision sans en référer à la Commission européenne, qui lui envoie régulièrement sa feuille de route et vérifie qu’il s’est bien exécuté.

La volonté de se dessaisir de toute forme de responsabilité a même atteint la mise en application des ordres reçus de Bruxelles. Le gouvernement fait appel aux cabinets de conseil afin de bien montrer à la Commission qu’il a fait tout ce qui était en son pouvoir pour remplir la mission qui lui a été confiée, et qu’il ne peut donc en aucun cas être responsable en cas d’échec.

En réalité, ce recours massif aux cabinets de conseil par nos gouvernants est avant tout un problème anthropologique. Il y a fort à parier que de Gaulle, Mitterrand et Chirac n’ont que très peu fait appel à des cabinets de conseil afin de les guider dans leurs décisions.

Depuis des décennies, nos dirigeants ont perdu toute prise sur le réel au profit de multiples institutions supranationales, entraînant une telle dégradation du matériau humain politique que les places sont maintenant occupées par des individus sans colonne vertébrale et sans courage, qui n’ont pour seule obsession que de se débarrasser au plus vite du peu de pouvoir de décision qui leur reste.

Georges Pompidou a dit : « Celui qui accepte les inconvénients de la vie politique, ses servitudes, ses responsabilités, ses salissures et parfois ses risques, le fait pour agir, pour imprimer sa marque aux événements, en un mot pour gouverner ».

Macron et ses mignons ne veulent donc tout simplement pas gouverner, mais seulement occuper les places, et afficher les oripeaux du pouvoir. Ce qui était jadis une fonction est devenu un simple emploi comme un autre. On recrutera bientôt les ministres par l’intermédiaire de cabinets de recrutement. Nos dirigeants sont devenus des salariés ordinaires.

Les Mc Kinsey et autres parasites ne sont en fait que les instruments qui ont permis la transition du « responsable mais pas coupable » vers le « ni responsable ni coupable ».

Alain Falento

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