Le Blog de Lazare

Si Poutine ne prend pas Odessa jusqu’à la Transnistrie, la Crimée sera éternellement menacée

Si la vidéo ci-dessous ne manque pas d’intérêt, je ne partage pas à 100 % l’avis du général Pinatel, interviewé par Régis de Castelnau sur les objectifs que vise Poutine en Ukraine.

https://reseauinternational.net/general-pinatel-conflit-mondial/

L’armée ukrainienne, absolument exsangue et reculant sur l’ensemble du front, mais sans pour autant s’effondrer, beaucoup s’interrogent sur les véritables intentions des Russes. Vont-ils lancer une vaste opération sur Odessa ou pas ?

Loin des délires de quelques illuminés occidentaux qui nous annoncent que l’Ours russe s’apprête à avaler l’UE ou des va-t-en-guerre des plateaux TV qui prétendent envoyer des troupes au sol en Ukraine, en oubliant que cette guerre fait 10 000 morts par mois, les avis divergent sur l’étendue des territoires que Poutine entend annexer. En attendant, que nos Rambo des plateaux TV, Macron en tête, prennent donc leur fusil et leur sac à dos, et rejoignent le front pour nous conter leurs expériences.

Il est évident que la donne a changé et que le prix à payer par l’Ukraine ne sera pas celui de mars 2022, quand Zelensky, pressé par Boris Johnson, a finalement rejeté le plan de paix élaboré à Ankara. 400 ou 500 000 morts plus tard, la guerre continue.

Le général Pinatel envisage deux scénarios

1°) Le plus probable selon lui, serait que Poutine se contente de conserver la Crimée et les quatre oblasts annexés en 2023. Ce sont dorénavant des régions russes faisant partie du territoire national et ceux qui  envisagent un retour aux frontières de 1991 sont de doux rêveurs.

2°) Le second scénario, auquel le général ne croit pas beaucoup, serait une prise d’Odessa en cas d’effondrement de l’armée ukrainienne. Option peu probable, selon le général, car le front à défendre et le territoire à conserver passeraient de 1 000 kilomètres actuellement, à 1 500 kilomètres.

Je ne partage pas les réserves du général Pinatel pour plusieurs raisons.

– Il semble oublier que les oblasts de Nikolaïev et Odessa sont peuplés  de Russes qui n’aspirent qu’à rejoindre la Fédération de Russie ;

– Il semble oublier que ces Russes ont subi les pires atrocités durant le coup d’État de 2014 et que Kiev ne manquera pas d’assouvir sa soif de vengeance sur ces populations à l’issue de la guerre. Poutine sait très bien qu’il leur doit protection, pour ne pas revivre les abominations de 2014 ;

– Il semble oublier que la sécurité de la Crimée passe par la prise d’Odessa en prenant le contrôle de la mer Noire. Toutes les attaques contre le pont de Crimée ou visant les navires de la flotte russe de Sébastopol, sont parties d’Odessa ;

– Il semble oublier que la Transnistrie souhaite aussi son rattachement à la Russie et que le pouvoir en place en Moldavie, très pro-occidental, ne manquera pas d’attaquer cette zone séparatiste si Poutine ne l’annexe pas.

En revanche, tout comme le pense le général Pinatel, je ne crois pas à l’invasion totale du territoire ukrainien. Quel serait l’intérêt de tenir la partie ouest du pays, pauvre et hostile à Moscou ? Ce serait une trop lourde charge, avec des attentats permanents contre les forces « d’occupation ».

Les accords de paix que signera Poutine exigeront la neutralité de l’Ukraine qui n’intégrera jamais l’Otan. C’est un impératif pour le Kremlin.

Le général Pinatel nous rappelle quelques vérités 

Cette guerre n’a plus le soutien des alliés de l’Ukraine et du peuple ukrainien, qui fuit la mobilisation.

À part un illuminé comme Macron qui veut envoyer 2 000 soldats pour effrayer l’Ours russe, alors que Poutine liquide 2 000 soldats ukrainiens chaque jour, tués et blessés, plus personne ne croit à la victoire de Kiev.

Tandis que Macron gesticule en pure perte en se ridiculisant un peu plus, Biden et Poutine s’entretiennent dans le dos de notre va-t-en-guerre que plus personne n’écoute. Ce que dit Macron, « on s’en fout », nous dit Piotr Tolstoï, le vice-président de la Douma.

Les républicains ne veulent plus d’une guerre longue. Quant aux démocrates, ils savent que 95 % des milliards octroyés à Kiev reviennent dans le complexe militaro-industriel américain. Avec quelques millions détournés au passage…

Il faudra plusieurs années pour reconstituer les stocks d’armes fournis par l’Otan.

Les États-Unis ayant réussi à briser durablement les liens entre la Russie et l’Europe ont atteint leur objectif, à défaut d’affaiblir la Russie. Cette guerre n’est donc plus leur priorité. Israël et la Chine accaparent les penseurs du Pentagone.

Et qui voudrait d’une guerre nucléaire pour un pays sans intérêt comme l’Ukraine ?

Jamais Poutine n’attaquera l’Otan, car ce serait un suicide collectif sous le feu nucléaire.

État de l’armée française

Si l’armée allemande est inexistante, puisqu’elle n’a jamais entendu un coup de fusil et manque de tout, l’armée française a un peu de tout mais manque cruellement de matériels et d’effectifs. Il faudrait 10 ans et un effort budgétaire colossal pour la reconstruire.

La disponibilité des matériels, faute de pièces détachées, est de 60 % dans l’armée de Terre, 70 % dans la Marine et 80 % dans l’armée de l’Air.

La France aligne 7 brigades dont 2 qui sont au standard Ukraine et qui pourraient tenir un front de 50 km durant quelques jours. La première armée de l’UE est squelettique.

La contre-offensive ukrainienne a mobilisé 20 brigades. Une hécatombe de plus de 160 000 soldats.

Et le général Pinatel nous fait une intéressante comparaison pour illustrer l’inaptitude dramatique de notre armée à une guerre de haute intensité.

– En 60 années d’Opex (opérations extérieures), la moyenne des pertes a été de 1 soldat tué par mois ;

– En Algérie, les pertes furent de 350 tués par mois ;

– En Indochine, elles furent de 500 soldats par mois ;

– En Ukraine elles sont de 10 000 tués par mois (chiffre largement sous-estimé à mon avis) ;

– Durant la Seconde Guerre mondiale elles furent de 80 000 soldats par mois.

Autant dire que notre brillant chef des armées, qui endosse l’habit du chef de guerre,  n’a aucune idée de ce qu’est une guerre de haute intensité quand il prétend envoyer des troupes de combat en Ukraine.

Quand la France produit 20 000 obus de 155 mm par an, les Russes en fabriquent 3 millions !

Tout est dit.

Jacques Guillemain