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24 juin 2024 1 24 /06 /juin /2024 10:25
Comment la France a perdu son indépendance énergétique

Des centrales en réparation, des réacteurs obsolètes : le nucléaire civil français est aujourd’hui en souffrance. Et pourtant, il a longtemps été le porte-étendard de l’excellence industrielle du pays. L’élaboration d’une industrie nucléaire, menée obstinément depuis la fondation du Commissariat à l’Énergie atomique en 1945, a abouti à la mise en place du troisième ensemble électro-nucléaire du monde.

Tout commença en 1955. Le site de Marcoule fut choisi pour une expérimentation. Trois ans plus tard, en 1958, Charles de Gaulle se rend sur le site de Marcoule. Son objectif est la sécurité énergétique du pays. Sa visite est un véritable enjeu politique. Pendant son mandat, de Gaulle fait la tournée des centrales. Septembre 1963 : à Tricastin dans la Drôme, il le répète : l’énergie de demain viendra du nucléaire.
« Nous avons décidé d’avoir ce qu’il nous faut. Et d’autant mieux, et d’autant plus, que cette puissance nucléaire comme on dit est liée directement à l’énergie atomique elle-même qui est comme vous le savez tous, le fond de l’activité de demain ».

En 1967, il tient exactement le même discours : « Nous en faisons une base pour un développement nouveau de l’énergie, et par conséquent du progrès ». De Gaulle continue sa politique nucléaire jusqu’à la fin de son mandat, en 1969. Plusieurs centrales sont lancées sous sa présidence. Dont celles de Saint-Laurent-des-Eaux, dans le Loir-et-Cher, du Bugey dans l’Ain, de Fessenheim en Alsace. Cette politique est poursuivie par ses successeurs.

6 mars 1974, Pierre Messmer, Premier ministre, présente le volet « indépendance énergétique de la grande politique énergétique lancée fin 1973 » : « Nous avons décidé de lancer entre 1974 et 1975, le lancement de 13 centrales nucléaires de 1000 mégawatts chacune qui coûtent environ 1 milliard de francs chacune. C’est une décision extrêmement importante ». Parallèlement, la décision est prise de développer la filière du surgénérateur utilisant le plutonium comme combustible.

En 1975, Valéry Giscard d’Estaing lance la construction de 45 centrales supplémentaires durant son septennat. Lorsque François Mitterrand accède à l’Élysée, les centrales nucléaires fournissent 37 % de l’électricité produite en France.

Face à la montée des mouvements antinucléaires, Mitterrand freine la mise en service des nouveaux réacteurs. « J’entends terminer les centrales en construction et je n’entends pas mettre en œuvre celles qui ne le sont pas », déclare-t-il lors de la campagne de 1981. L’abandon du projet de centrale à Plogoff, dans le Finistère, illustre les réticences de Mitterrand envers l’énergie atomique.

En 1988, la France compte 54 réacteurs en fonctionnement et 10 en construction. Avec 16 % de la puissance mondiale, elle se classe au deuxième rang derrière les États-Unis. En raison de leur grand besoin en eau, les centrales se localisent sur les rives des fleuves et sur les littoraux (Manche, Mer du Nord), chaque site regroupant 2 à 6 réacteurs. Leur implantation est également déterminée par la volonté de fournir des régions déficitaires ou fortes consommatrices (Rhône-Alpes, région parisienne).

Jacques Chirac, successeur le Mitterrand, est un fervent partisan du nucléaire. Il décide notamment la construction de l’EPR de Flamanville et lance un prototype de réacteurs de quatrième génération rapides et refroidis au sodium. Le projet, baptisé Astrid, sera définitivement arrêté par Macron en 2019.

C’est surtout sous la présidence de Hollande que la filière nucléaire connaît ses premiers reculs. Hollande veut réduire la part du nucléaire de 75 % à 50 % de la production nationale d’électricité à l’horizon 2025. En avril 2017, il acte la fermeture de la centrale de Fessenheim, décision qui sera entérinée en novembre 2018 par Macron, effective en 2020.

Les enjeux du nucléaire sont considérables. Le nucléaire devient L’INSTRUMENT DE DÉPENDANCE ÉNERGÉTIQUE. À ses beaux jours, il assurait 70 % de la production d’électricité et représentait 28,5 % de la consommation d’énergie primaire. Dans le domaine technique, l’indépendance était acquise : enrichissement de l’uranium, usine de retraitement des combustibles qui fournit le plutonium nécessaire au surgénérateur de Creys-Malville.

La maîtrise de l’approvisionnement en combustible devient primordiale. La production nationale d’uranium est insuffisante, le complément provient des mines exploitées par la COGEMA, au Niger, au Gabon et au Canada. Et la réalisation du programme électronucléaire a des retombées économiques importantes. Avec l’interconnexion des réseaux européens, la France exporte de l’électricité vers ses voisins, ce qui, en 1986, lui a rapporté 3,5 milliards de francs de devises.

Ce programme électro-nucléaire a fait naître une industrie française du nucléaire autour d’EDF, de la COGEMA (Compagnie générale des matières nucléaires), d’Uranium-Péchiney, de Framatome, et Alsthom pour les alternateurs, Alsthom qui exporte sa technologie et son savoir-faire. Alsthom, un des plus grands conglomérats industriels français, présent dans l’énergie, le nucléaire, le ferroviaire, les transports, a été vendu en 2014, puis démantelé. L’Américain General Electric a pris le contrôle des activités énergie, au terme de manœuvres obscures et menace désormais de les liquider. En 2019, son avenir n’était plus assuré. Tout s’est fait avec l’assentiment du gouvernement français, et notamment de Macron, acteur décisif dans ce dossier. En 2020, Anticor a déposé plainte pour corruption et détournement de fonds publics.

La déconfiture financière de General Electric entraîne la cession de ses activités énergie, dont celles reprises à Alsthom en 2014. En signant la vente quand il était à Bercy, Macron a donc parié sur la mauvais cheval… en plus d’avoir laissé filer à l’étranger des activités stratégiques pour la France. À peine sept ans après avoir racheté les activités énergie d’Alstom, General Electric compte déjà les revendre… Non sans les avoir passées à la lessiveuse des restructurations et des délocalisations. Un nouveau désastre pour l’industrie française.

En 2022-2023, sur fond de guerre en Ukraine, la question de l’énergie française est de nouveau sur la table. L’inquiétude grandit autour de la pérennité des centrales nucléaires. Les problèmes d’énergie deviennent de plus en plus tendus, d’abord du fait de la pénurie du gaz russe organisée par Moscou, et en réponse à la politique pro-ukrainienne de Macron, ensuite en raison d’anomalies en série qui touchent les centrales nucléaires d’EDF. Macron a bradé la filière du nucléaire française. Il a vendu Alsthom, il a fermé la centrale nucléaire de Fessenheim, il a acté la fermeture de 14 réacteurs nucléaires d’ici 2035.

Toutefois, en février 2022, Macron a fait volte-face en revenant sur la sortie du nucléaire. À Belfort, il a annoncé la commande de six nouveaux réacteurs nucléaires et annulé la fermeture de centrales nucléaires à l’avenir, sauf raisons de sûreté.

Malgré les belles paroles de Macron, et en grande partie par sa faute, la France a perdu son indépendance énergétique et tous les Français en paient le prix fort, en particulier les plus déshérités. Les prix de l’électricité et de l’énergie flambent comme jamais. L’indépendance énergétique était le fleuron de notre industrie, Macron et Hollande l’ont soldée et bazardée.

Résultat. Depuis la nuit de lundi 8 à mardi 9 janvier 2024, en raison de la vague de froid, la centrale à charbon Émile-Huchet, à Saint-Avold, en Moselle, fonctionne à pleine puissance (600 Mega watts). La majorité des réacteurs nucléaires installés en France ont une puissance de 900 Mégawatts, et jusqu’à 1450 Mégawatts pour les plus récents, à Chooz, dans les Ardennes et Civaux dans la Vienne. Grosse émettrice de CO2, cette centrale à charbon reprend du service, suite à la guerre en Ukraine et aux déboires du parc nucléaire. Qui veut absolument faire la guerre en Ukraine, contre la Russie ? Qui a participé au démantèlement du parc nucléaire ? Qui prétend lutter contre le CO2 et revient au charbon ?

Nous étions à la pointe du nucléaire et profitions d’une indépendance énergétique certaine. Aujourd’hui, nous avons tout perdu, par la faute de politiques soumis aux diktats des écologistes, la technologie de pointe, l’indépendance énergétique, et un prix de l’électricité abordable.

Depuis les années 1960, les antinucléaires critiquent cette forme d’énergie et avancent des arguments. Le nucléaire produit des déchets radioactifs qui durent longtemps. Nous disposons de ressources limitées pour le nucléaire. Les ressources en nucléaire ne se renouvellent pas, le pétrole se forme en continu sous terre. Une centrale nucléaire pose des problèmes de sécurité. Deux accidents ont déclenché des dégâts considérables : 26 avril 1986, la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, en Ukraine (entre 43 et 4000 décès), et 11 mars 2011, la catastrophe nucléaire de Fukushima, au Japon, à la suite d’un tsunami (18 000 morts par noyade).

Le nucléaire a été imposé sans acte démocratique, sans consulter la population. Le rendement du nucléaire est faible. 30 % de l’énergie nucléaire libérée sera convertie en énergie électrique au final. Le reste est de l’énergie inutilisable et perdue. À titre de comparaison, une centrale hydroélectrique possède un rendement de 70 % à 85 %, une centrale thermique de 40 %. Le prix de l’énergie est condamné à augmenter. La demande en uranium ne fera qu’augmenter tandis que l’offre diminuera. Les déchets nucléaires posent des problèmes écologiques. Il faut les stocker quelque part. Le nucléaire est aussi sensible au climat : centrales inondées, arrêt forcé pour cause de canicule. L’argent investi dans le nucléaire est de l’argent perdu qui ne sera pas investi ailleurs. Le nucléaire entrave des recherches durables, faute de fonds alloués à d’autres secteurs.

Les pro-nucléaires avancent d’autres arguments. Une centrale qui tourne produit 0 gramme de CO2, ne rejette que de la vapeur d’eau. Le nucléaire produit beaucoup d’énergie sur un court laps de temps. La France possède ou possédait suffisamment d’installations nucléaires pour produire toute son électricité, sans requérir d’autres moyens de production.

Le nucléaire est une énergie bien plus constante que le renouvelable. Le nucléaire possède peu de temps morts, un facteur de charge de 75 %. Un panneau photovoltaïque a un facteur de charge de 10-15 %. Les éoliennes entre 20-25 %. Seule l’énergie hydroélectrique est suffisamment stable pour être fiable. Le nucléaire requiert peu de ressource pour beaucoup d’énergie. Une masse d’uranium enrichi produit des milliers de fois plus de chaleur que cette même masse en charbon.

Le nucléaire économise les ressources fossiles carbonées de la terre.
Le nucléaire crée de l’emploi et soutient l’économie.
Le nucléaire permet de faire de la recherche, donc un développement scientifique continu et durable.
Le nucléaire dispose d’une espérance de vie élevée par centrale. De très nombreuses centrales tournent encore au-delà de 40 ans de fonctionnement, et restent en très bon état. La durée de vie des systèmes d’énergie renouvelables, 30 ans pour les panneaux photovoltaïques, 25 ans pour les éoliennes, 20 ans pour une pompe à chaleur géothermique. 50 ans pour les barrages hydroélectriques.
Le nucléaire est bon marché.

Sortir la France du nucléaire d’ici 2035 nous coûterait bien trop cher, 217 milliards d’euros en coûts directs, plus des pertes indirectes colossales (perte de compétitivité des entreprises, perte d’image de la filière nucléaire).

L’énergie nucléaire est tournée vers l’avenir. Les centrales troisième et quatrième générations utilisent du thorium, plus répandu et plus efficace que l’uranium, thorium qui pourrait être une solution de substitution. Il est désormais possible de recycler les déchets. Les nouvelles centrales sont extrêmement sûres.

Jean Saunier

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