L’association Anticor gênait la Macronie : exit Anticor. Quand on met son nez dans des affaires (liste très loin d’être exhaustive) aussi sensibles que :
- la vente de la branche énergie d’Alstom à l’Américain General Electric, dans laquelle Macron est mouillé jusqu’au cou,
- l’enquête pour prise illégale d’intérêts visant le secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler,
- les liens entre le ministère de l’Education nationale et la société américaine Microsoft,
- ou encore l’affaire Dupont-Moretti, qui ne dut son salut qu’à la gentillesse des magistrats de la Cour de justice de la République,
il ne faut pas s’étonner que le pouvoir macronien ne vous ait pas en odeur de sainteté.
L’association Anticor qui lutte pour rétablir l’éthique dans le monde politique vient de voir refuser le renouvellement de son agrément qui lui aurait permis de continuer d’ester dans les affaires de corruption et d’atteinte à la probité présumées, notamment en cas d’inaction du Parquet.
Un refus qui n’est pas explicite, mais « en même temps » sans ambiguïté : cet agrément aurait dû faire l’objet d’une mention dans le Journal officiel avant la date butoir, à minuit dans la nuit de mardi à mercredi 27 décembre, ce qui n’a pas été le cas.
Exit donc le pouvoir de nuisance d’Anticor à l’encontre de la Macronie. C’est un « cadeau de Noël pour les corrupteurs », se désole l’avocat d’Anticor, Me Vincent Brengarth. La ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, avait hérité du dossier après le déport d’Elisabeth Borne pour éviter tout conflit d’intérêts, celle-ci étant impliquée dans deux procédures avec Anticor. Une translation parfaitement tartuffesque : il est évident que la ministre Colonna a fait ce que la Première ministre Borne lui a dit de faire : poubelle, Anticor !
« Cette décision ne nous surprend pas malheureusement, car nous sommes bien conscients que nos actions contre la corruption agacent profondément le gouvernement», a réagi Elise Van Beneden, présidente du bureau de l’ONG Anticor. Ce refus implicite «intervient après une instruction de six mois durant laquelle aucun dysfonctionnement ne nous a été reproché par le gouvernement et alors même que la Première ministre a considéré en octobre qu’Anticor remplissait toutes les conditions pour être agréée», a-t-elle ajouté. Elle annonce vouloir «contester cette décision devant la justice administrative», tout en étant «d’une certaine manière soulagée de pouvoir enfin démontrer que l’association remplit bien tous les critères pour être agréée, à l’abri des considérations politiques du gouvernement».
Depuis 2015, l’ONG Anticor faisait partie des rares organisations (avec Transparency France et Sherpa) agréées par le ministère de la Justice pour se porter partie civile dans des dossiers de lutte contre de la corruption. Renouvelable tous les trois ans, cet agrément lui avait été de nouveau accordé en avril 2021, par le Premier ministre de l’époque, Jean Castex – déjà, le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, avait dû se déporter pour éviter tout conflit d’intérêts –. La décision favorable avait été précédée par de longues tergiversations, que l’organisation attribuait à ses plaintes contre plusieurs membres ou proches du gouvernement.
En juin 2023, Anticor s’est vu retirer son agrément par le tribunal administratif de Paris. L’appel ayant confirmé, en novembre, l’annulation de l’agrément, l’ONG espérait que la ministre Catherine Colonna aurait «à cœur de préserver l’action citoyenne contre la corruption car elle est essentielle», comme l’écrivait l’association sur X-Twitter, lundi 25 décembre. En vain…
«La lutte contre la corruption doit constituer une priorité et nécessite une tolérance zéro, a déclaré François Molins, ancien procureur général près la Cour de cassation. Il serait plus sain pour notre démocratie que ce ne soit pas le gouvernement qui statue sur les demandes d’agrément mais une autorité administrative indépendante comme la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.» Un vœu sans doute pieu…
Le fait que, ces derniers mois, des référents locaux de l’association aient été accusés d’abus de pouvoir pouvant aller jusqu’à la tentative de chantage a pu servir de prétexte au gouvernement pour faire la peau de l’ONG. Ces dérives, certes regrettables, ne sont pas de nature à remettre en cause le travail essentiel d’Anticor : lutter contre la corruption qui pourrit nombre de strates de l’Etat…
Henri Dubost