Le train blindé du dictateur nord-coréen est arrivé en Sibérie pour la rencontre avec le “camarade Poutine”, malgré les menaces de représailles de Washington. Il y a peu, c’est le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgu, qui avait effectué une visite en Corée du Nord, sans doute pour définir les besoins russes en armement. Et dans un train, on met beaucoup de munitions ou de pièces d’artillerie…Les entretiens ont duré six heures.
https://fr.sputniknews.africa/20230913/ce-quil-faut-retenir-de-la-rencontre-entre-vladimir-poutine-et-kim-jong-un-1062087010.html
Dès lors que la Corée du Sud a choisi ouvertement le camp ukrainien, dès lors que 40 nations soutiennent l’Ukraine, dont 25 militairement, en quoi la rencontre du leader nord-coréen avec Poutine pose problème ?
Ce n’est quand même pas Washington qui va opposer son veto aux alliances de Moscou !
Kim Jong-un est sans doute un dictateur en son pays et provoque souvent Séoul, mais depuis la signature, en 1953, de l’armistice qui sépare les deux Corées de part et d’autre du 38e parallèle, Pyongyang n’a agressé aucun pays ni déclenché aucune guerre, contrairement à Washington, qui sème la mort sur toute la planète et ne peut vivre en paix depuis 1776. Semer la mort au nom de la démocratie en se réclamant du camp du Bien ne manque pas de sel.
Rappelons que c’est au nom de la démocratie, en 2014, que la CIA a renversé le régime prorusse en place à Kiev. On connaît la suite : guerre du Donbass avec 15 000 morts et opération spéciale russe en 2022.
Si Washington voit dans cette rencontre un signe d’épuisement de l’armée russe ou une preuve de l’isolement de Poutine, c’est que les faucons du Pentagone font une analyse particulièrement erronée de la situation.
L’armée russe tire sans doute un million d’obus par mois et les stocks soviétiques ne sont pas inépuisables, mais le souci de Poutine n’est pas d’obtenir une aide militaire de Pyongyang pour continuer son opération spéciale, puisqu’il pourrait écraser l’Ukraine en 48 heures, son principal objectif est de préserver l’essentiel du potentiel de combat de la Russie en prévision d’un affrontement direct avec l’Otan, toujours possible avec des fous incapables de vivre en paix.
Et Poutine sait très bien qu’il aura besoin d’alliés militairement puissants si une étincelle embrase la planète.
Par conséquent, munitions, lance-roquettes multiples ou missiles nord-coréens sont les bienvenus pour conserver l’essentiel du potentiel russe et pour permettre à Moscou d’axer son effort industriel de défense sur les armes du futur, qui assurent sa supériorité sur l’Occident.
On ne fabrique pas les Kinzhal à la même cadence que les millions d’obus.
Mais quand je lis que Poutine a besoin de soldats pour faire masse face aux Ukrainiens, je me dis que certains observateurs n’ont toujours pas compris que Kiev a perdu 400 000 soldats et que la contre-offensive se solde par un fiasco avec plus de 70 000 tués. Il n’y a plus de troisième armée ukrainienne.
Zelensky perd chaque mois 20 000 soldats qui sont tués. Ou bien Kiev abandonne ses rêves de reconquête de la Crimée, ou bien il lui faudra reconstruire une quatrième armée avec l’Otan, qui sera opérationnelle dans six ou dix mois. Mais ce sera peine perdue. Les Russes lamineront cette armée comme les trois autres.
De son côté, Kim Jong-un est en quête de technologie de pointe pour son arsenal nucléaire et notamment les vecteurs de ses missiles, ainsi que pour développer le domaine spatial. Une aide alimentaire russe pour Pyongyang serait aussi la bienvenue.
Autre secteur intéressant Moscou : la main d’œuvre nord-coréenne, fort appréciée comme toute main d’œuvre asiatique, compétente et motivée. Car la Russie manque de bras.
Par ailleurs, prétendre que Poutine en est réduit à se rapprocher de Kim Jong-un parce qu’il est isolé, est une fable.
Isabelle Lasserre, dans Le Figaro, nous rappelle qu’au printemps 2022, c’est une cinquantaine de pays qui ont refusé de condamner l’offensive russe. Après 18 mois de guerre, tous les efforts et les menaces des Occidentaux pour faire basculer ces pays dans le camp pro-ukrainien sont restés vains.
Il suffit de regarder le bilan du sommet des BRICS en Afrique du Sud et celui du G20 en Inde, ou de mesurer le rejet de la France en Afrique, pour comprendre que Washington a perdu la main. Le monde émergent est bien décidé à se faire entendre de cet Occident dominateur, qui règne sans partage depuis trop longtemps.
On se bouscule pour intégrer les BRICS, qui passent à 11 membres et le G20 n’a pas été un sommet anti-russe et pro-ukrainien, comme espéré par Washington. Le ressentiment à l’égard de l’Occident est le ciment des BRICS.
Les Occidentaux qui comprennent peu à peu que la partie est perdue en Ukraine, aiment se persuader que cette guerre a renforcé l’Otan. Erreur. Cette guerre a surtout accéléré l’affranchissement du Sud global, qui a pris conscience de sa puissance économique et de son poids démographique pour peser sur monde.
De plus, la démocratie et les droits de l’homme n’ont jamais fait rêver le Sud global. Dans ces pays, ce sont les régimes forts qui s’imposent pour empêcher l’anarchie, le chaos et l’insécurité. Quant aux délires LGBT, la destruction de la famille traditionnelle avec un père, une mère et des enfants, et la décadence en tous genres, ce sont des épouvantails pour les sociétés émergentes conservatrices.
En Afrique, ni les Russes, ni les Chinois ne donnent des leçons de droits de l’homme aux dirigeants. Moyennant quoi, ce sont les ex-colonisateurs qui sont chassés du continent. Beau bilan.
Les États-Unis ayant empêché les Européens d’arrimer la Russie à l’UE, ils en paient aujourd’hui le prix fort.
Ils devront faire face à une alliance anti-occidentale redoutable comprenant la Russie, la Chine, la Corée du Nord et l’Iran. Et je pense qu’en cas de croisade américaine contre la Chine, pour défendre Taïwan, une coalition comprenant l’Otan, l’Australie, le Japon et la Corée du Sud ne pèserait pas bien lourd.
La “cohésion” de l’Otan face à Moscou, que Washington se plait à rappeler, se disloquerait bien vite face à Pékin. Il n’y a aucune illusion à avoir à ce sujet. Bernés avec l’Ukraine et ruinés, les Européens ne renouvelleront pas l’exploit.
C’est le moment de quitter l’Otan une bonne fois pour toutes, parce que l’Amérique attisera toujours les braises.
Jacques Guillemain
Kim Jong-un en Extrême-Orient russe : où est le problème ?
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